Durant les premières décennies d’application de l’informatique aux disciplines philologiques et à l’ecdotique, le temps d’élaboration requis pour mettre en place des outils d’érudition performants incitait le plus souvent les chercheurs à développer des bases de données autonomes, constituant des environnements de travail relativement clos sur eux-mêmes. L’émergence des « humanités numériques », consubstantielle à l’existence d’internet, semble avoir rendu quelque peu obsolète une telle conception des bases de données, et certains projets assument dorénavant la nécessité de changer radicalement d’échelle, en coordonnant des réseaux internationaux[1]. Pourtant, la nature même du travail d’inventaire préalable à toute édition fondée sur le recours aux manuscrits originaux implique une forte spécialisation des outils, et l’accumulation lente d’observations minutieuses[2]. L’organisation d’échanges réciproques de données entre plusieurs bases dont les architectures diffèrent pose donc un défi à la fois intellectuel et technique. C’est à ce défi qu’ont été confrontées deux équipes de recherche françaises, l’une se consacrant aux données matérielles concernant principalement les supports de manuscrits et lettres du XVIIe au XXe siècle, l’autre développant l’inventaire des lettres et manuscrits de Condorcet. Afin de présenter ici l’interconnexion entre les bases – Muse et Ribemont – de ces deux équipes, nous allons procéder en trois étapes. Une présentation de la base Muse et de son système d’information sera suivie d’un descriptif de la base Ribemont. Les objectifs de l’interconnexion entre les deux bases seront ensuite examinés dans le contexte du programme de recherche Inventaire Condorcet[3].
1. La base Muse
La base Muse a été conçue dans le cadre des études génétiques appliquées aux textes littéraires modernes et contemporains au sein de l’Institut des textes et manuscrits modernes (ITEM, CNRS), puis s’est développée en traitant également des manuscrits scientifiques ou philosophiques ainsi que des correspondances. Parmi les aspects matériels qu’elle permet d’inventorier, sa spécificité est d’intégrer une étude particulièrement approfondie des supports d’écriture, selon les principes de la codicologie.
1.1. Retour aux origines
La codicologie est la science du codex (support d’écriture plié, par opposition au rouleau), discipline érudite longtemps considérée comme « auxiliaire de l’histoire », qui a été initialement développée par les médiévistes, notamment à l’Institut de recherche et d’histoire des textes du CNRS (IRHT)[4]. Entre 1978 et 1988, Louis Hay et Marianne Bockelkamp ont entrepris d’appliquer l’examen codicologique aux « manuscrits de travail » modernes et contemporains[5], à commencer par le corpus d’Heinrich Heine qui venait d’intégrer les collections de la Bibliothèque nationale. En prenant appui sur une analyse matérielle systématique et détaillée des différents corpus abordés par la critique génétique, ils ont été les pionniers d’une méthodologie innovante.
L’examen de l’organisation matérielle des brouillons et la collecte des données feuillet par feuillet sont des tâches relativement fastidieuses, mais riches en observations utiles pour contribuer à classer ou dater des manuscrits ou des lettres selon une chronologie cohérente, et pour appréhender les méthodes de travail spécifiques de chacun des auteurs étudiés.
L’un des indices matériels les plus probants s’est révélé être l’étude du papier, et en particulier des filigranes qui permettent de les identifier. Cependant la rareté des ouvrages de référence sur l’usage du papier à écrire ainsi que celle des répertoires de filigranes pour la période XVIIe-XXe siècle, jusqu’à la parution du répertoire de Raymond Gaudriault en 1995[6], a rendu nécessaire la création simultanée d’un outil d’expertise et d’une typologie de référence, qui ont été mises en œuvre à l’ITEM entre 1986 et 1996 sous la forme d’une première base de données, intitulée « Profil »[7]. Mais l’ampleur des nouveaux corpus abordés, tel celui des manuscrits de Stendhal, et la complexité du système d’information à organiser pour traiter la diversité des configurations non linéaires rencontrées dans les brouillons ont requis la conception d’une nouvelle base de données, sur le modèle relationnel : Serge Linkès et Claire Bustarret ont collaboré à l’ITEM sur ce projet depuis la fin des années 1990, avec le soutien dans un premier temps des programmes « Archives de la création » puis « Patrimoine écrit » du CNRS. La base intitulée « Manuscrits, Usages des Supports d'Écriture » (M.U.S.E.), qui s’est donné pour objectif d’allier l’étude codicologique et l’approche génétique des lettres et manuscrits d’auteur, fonctionne depuis le début des années 2000[8]. Or, comme le constatait encore en 2019 les partenaires du programme « Signed, Sealed, and Undelivered » au sujet des correspondances, « les caractéristiques matérielles des lettres […] ont jusqu’à présent rarement été saisies dans les bases de données épistolaires, qui ont surtout mis l’accent sur les données relatives au contenu telles que la date, le lieu, l’auteur/expéditeur, et les mots-clés »[9]. Le cas des manuscrits est largement comparable sur ce point.
1.2. La base Muse : un outil d’expertise codicologique multicorpus
La base de données relationnelle Muse comporte deux volets principaux (Fig.1) : un outil d’expertise codicologique, qui sert à décrire en détail la matérialité des manuscrits ou des lettres selon un protocole complet, et un outil de référence codicologique, qui permet d’identifier en particulier les papiers filigranés fabriqués et utilisés pour écrire du XVIIe au XXe, voire au XXIe siècle[10].
L’application Muse conçue avec FileMakerPro (un environnement de création d'application de type RAD - Rapid-Application Development) est hébergée depuis 2018 sur des serveurs fournis par l'Infrastructure de Recherche HUMA-NUM[11]. La section « Outil d’expertise » de la base, bien qu'accessible en ligne, reste à ce jour en accès réservé sur demande aux seuls collaborateurs des projets. Il est prévu de publier la section « Outil de référence » de Muse en libre accès, mais cette opération demanderait un nouveau financement spécifique afin d’effectuer un contrôle des données les plus anciennes, associé à une importante campagne de reproduction photographique de filigranes, et en vue d’assurer la gestion de la future interface de consultation.
De nombreux corpus ont été traités via la base Muse, de façon ponctuelle ou approfondie, selon les besoins des chercheurs qui souhaitaient tantôt dater tel ou tel document, tantôt établir la chronologie interne d’un dossier de brouillons, tantôt aborder de façon plus systématique les aspects matériels d’une correspondance ou d’une œuvre dont ils préparaient l’édition, afin d’étayer leurs hypothèses d’interprétation. Il s’agissait par ailleurs de favoriser la continuité historique des données produites concernant l’histoire du papier et la filigranologie, en particulier française, dès lors que la plupart des répertoires de filigranes existants étaient consacrées aux périodes antérieures à 1600.
Principaux corpus d’auteurs traités dans Muse :
XVIIe s. Bossuet et Collection d’autographes Rothschild (BnF)
XVIIIe s. Diderot, Montesquieu, Condorcet, Rousseau
XIXe s. Stendhal, Flaubert, Balzac, Zola
XXe s. Proust, Valéry, Duchamp, Guilloux
L’approche multicorpus constitue l’une des originalités de notre base, à la différence de bases monographiques réservées à un corpus unique d’écrivain ou d’artiste[12], ou de bases d’orientation plus filigranologique[13], pour lesquelles les documents examinés constituent seulement des sources de datation du filigrane, et non l’inverse. La base Muse allie ces deux perspectives, en établissant un répertoire de papiers filigranés qui prend en considération, outre le filigrane, une quarantaine de caractéristiques permettant de décrire la feuille de papier entière[14], tout en associant étroitement l’étude de l’œuvre écrite à celle des supports et des tracés.
Les résultats de ces analyses matérielles ont le plus souvent été publiés, soit en annexe d’éditions, soit sous forme d’articles monographiques. Outre le corpus Condorcet sur lequel nous reviendrons ci-après, ont ainsi été abordés les cahiers d’écolier dont Raymond Roussel détachait les feuillets après chaque séance de travail pour rédiger Impressions d’Afrique, et ceux de La Recherche du temps perdu, sur lesquels Marcel Proust greffait ses « paperolles »[15] ; les vergés « Whatman » de Balzac et les vélins ivoire de Zola, qui illustrent la progressive standardisation du papier de fabrication mécanique[16] ; les brouillons de l’Esprit des Lois dont les lieux de rédaction (entre Paris et le château de La Brède, près de Bordeaux) ont pu être déterminés plus précisément grâce à la provenance du papier[17], indices géographiques qui ont également été exploités pour reconstituer la genèse controversée de Lamiel de Stendhal, roman rédigé entre Cività-Vecchia, en Italie, et Paris[18]. Au fil du temps et au gré des corpus de nature et d’ampleur variées, l’utilisation assidue de la base Muse a fourni les fondements d’une meilleure connaissance des pratiques matérielles de nombreux philosophes, scientifiques, romanciers ou poètes dont les papiers constituent des archives remarquables.
Il faut cependant noter que s’est progressivement établie une prépondérance quantitative des corpus des Lumières parmi les auteurs traités, pour des raisons entre autres techniques. En effet, à l’échelle d’un corpus individuel et sans recourir aux analyses optiques ou chimiques, le papier de fabrication manuelle, mode de production dominant en France jusque dans les années 1840, offre des indices plus exploitables que le papier industriel. La collecte des données se pratique en salle de lecture des archives ou des bibliothèques, sans outillage particulier, hormis une feuille lumineuse pour obtenir des photographies en lumière transmise et un micromètre pour mesurer l’épaisseur du papier.
1.3. Les objectifs de l’expertise codicologique
L’expertise codicologique telle que nous l’appliquons aux manuscrits et aux correspondances de l’ère moderne et contemporaine consiste en premier lieu à inventorier et distinguer les différents supports, autant que possible les différents tracés, et le cas échéant les différentes mains qui ont contribué à donner à chaque écrit son identité[19]. De l’inventaire méthodique des caractéristiques matérielles découle la nécessité d’établir une typologie des supports d’écriture (cahiers, carnets, liasses, feuilles volantes…) et des papiers utilisés (vélins, vergés, filigranés ou non, fabriqués selon les cas à la main ou à la machine, etc.). Pour la période de production manuelle, qui concerne tous les corpus des Lumières, nous considérons comme un « type » de papier l’ensemble des feuilles produites par la même paire de formes, outil de fabrication dont la durée d’utilisation par le papetier varie d’un à deux ans[20]. D’après les historiens du papier, plusieurs milliers de feuilles produites par le même fabricant à l’aide d’une même paire de formes peuvent avoir été utilisées de façon plus ou moins suivie pendant une durée moyenne de trois ans, durée parfois étendue jusqu’à cinq ans[21]. Cette évaluation est confirmée en règle générale par les corpus du XVIIIe siècle que nous avons étudiés le plus systématiquement (Diderot, Montesquieu et Condorcet), sauf exceptions ponctuelles.
Au relevé systématique des caractéristiques du support s’ajoute une tâche d’identification des « mains » des différents scripteurs – contemporains de l’auteur, comme par exemple les secrétaires de Montesquieu, les destinataires des lettres de Condorcet, ou posthumes, comme les héritiers (la femme et la fille de Condorcet), les marchands d’autographes, les collectionneurs ou les personnels des institutions de conservation. Comme l’ont montré en particulier les recherches menées par Catherine Volpilhac-Auger sur les manuscrits de Montesquieu[22], les recoupements entre l’inventaire des types de papier et la liste des secrétaires a permis de produire diverses hypothèses sur les lieux et les dates de rédaction, ou de les vérifier.
L’apport de l’analyse matérielle que nous menons grâce au protocole de la base Muse nous permet de contribuer au classement génétique et à la datation d’ensembles de manuscrits souvent complexes. Le travail de longue haleine effectué avec Nicolas Rieucau sur les manuscrits du Tableau historique des progrès de l’esprit humain au début des années 2000 a permis de préciser les contours des trois principales phases de travail (1772, fin des années 1780 et 1793-1794), et d’enrichir la datation de certains fragments isolés[23]. Par ailleurs, la correspondance que Condorcet a rarement datée de façon précise posait d’importantes difficultés aux éditeurs : en procédant par des recoupements fondés notamment sur la typologie des papiers, les partenaires de l’Inventaire Condorcet ont bénéficié d’éclairages nouveaux sur certaines lettres dont le contenu se prêtait à diverses hypothèses de datation[24].
Dans certains cas, les vergés du XVIIIe siècle portent un filigrane millésimé, indiquant la date de fabrication du papier, ce qui fournit un terminus ante quem non. Mais dans le cas le plus fréquent, ce sont les différentes occurrences d’un même type, répertoriées tant parmi les manuscrits que dans la correspondance, qui permettent aux chercheurs d’établir une fourchette d’utilisation plus ou moins précise : certains papiers n’ont été employés que pendant quelques mois, tandis que d’autres comptent des centaines d’occurrences, parfois réparties sur plusieurs années – sans compter les éventuels réemplois tardifs de feuillets vierges récupérés dans des dossiers anciens, qui ne peuvent être exclus a priori. Des dates incomplètes, voire allographes, peuvent aussi donner lieu à une exploitation inespérée grâce au recoupement avec le type de papier, comme celle que Ruault porta sur un billet reçu de Condorcet pendant la préparation de l’édition dite « de Kehl » des Œuvres de Voltaire : « reçu le vendredi 16 fev.r ». Quoique le billet in-4° ne porte qu’un quart de la contremarque, le type BNF571 répertorié dans Muse est identifiable à l’aide d’autres caractéristiques du papier. Tandis que le calendrier fournit à cette période deux vendredi 16 février, en 1781 et en 1787, la fourchette d’utilisation de ce type de papier dans la correspondance de Condorcet est de 1781 à 1783 : le recoupement aboutit par conséquent à la date du 16 février 1781[25].
Il va de soi que les caractéristiques matérielles d’un corpus écrit de l’ère moderne telles qu’observables aujourd’hui résultent d’un nombre d’interventions trop nombreuses au cours de la rédaction, puis de la transmission et de la conservation de l’archive, pour donner lieu à quelque assertion péremptoire que ce soit, qu’il s’agisse de datation ou d’interprétation. Seules des corrélations fortes entre les types de papier, les scripteurs, les instruments d’écriture, avec les observations érudites portant sur les contenus textuels et les circonstances biographiques permettent d’identifier les phases d’écriture, de dater une correspondance ou de reconstituer avec rigueur le dossier génétique d’une œuvre[26]. Mais les expériences menées depuis vingt ans à l’aide de la base Muse sur différents corpus, notamment ceux des Lumières, prouvent que de telles corrélations sont suffisamment fructueuses pour justifier le temps de travail important qu’imposent l’expertise codicologique et le travail d’équipe entre spécialistes de plusieurs disciplines pour tirer parti des données ainsi engrangées.
Pour résumer, les objectifs de l’expertise matérielle d’un corpus manuscrit consistent à produire un inventaire matériel systématique, mis à disposition des spécialistes de l’auteur et de la période considérés, afin de contribuer à l’identification des scripteurs, à la datation approximative ou relative (exceptionnellement à une datation exacte) et au classement d’une correspondance ou des pièces constituant le dossier de genèse d’une œuvre. Considérées à une échelle plus générale, les données matérielles produites en utilisant la base Muse viennent enrichir les connaissances disponibles en histoire du papier et peuvent également alimenter l’étude des pratiques d’écriture plus ou moins courantes observées pendant une période donnée, notamment au siècle des Lumières.
1.4. Le système d’information de la base Muse
Le fonctionnement de la base Muse permet principalement deux opérations : d’une part travailler sur un corpus spécifique (description matérielle et intellectuelle, classement, transcription, etc.) et d’autre part établir, à partir de la compilation des données collectées sur chaque corpus, une typologie de référence concernant les papiers à écrire à partir du XVIIe siècle[27]. Chaque corpus peut ainsi profiter des types de papier identifiés dans les corpus traités précédemment et bénéficier d’informations précieuses, notamment quant à la datation des documents. Muse offre également aux chercheurs travaillant sur des archives manuscrites qui souhaiteraient s’engager dans un projet de collaboration la possibilité d’exploiter les résultats de l’analyse matérielle à partir de leurs propres interfaces (éditions et inventaires numériques), comme le montre l’interconnexion de Muse et Ribemont, enrichissant ainsi les données qu’ils souhaitent diffuser dans le cadre des humanités numériques.
La base Muse se présente donc comme une interface à la fois dynamique et paramétrable, capable de fonctionner de façon autonome ou de se mettre au service des sites d’archives numérisées, quelles que soient les contraintes du corpus traité ou de la technologie utilisée[28]. De plus, la base Muse rassemble des corpus de teneur variée : manuscrits et lettres, brouillons et copies corrigées, tapuscrits, cahiers d’écoliers et copies d’apparat, de la main d’une centaine de scripteurs différents. L’ampleur des données collectées permet aussi un retour statistique non négligeable sur les usages et les habitudes d’écriture d’un point de vue synchronique et diachronique, à titre individuel ou dans une perspective comparative, qui n’a été que peu exploité jusque-là.
Enfin, le fait que Muse soit une base de données relationnelle permet à l’application d’accompagner le chercheur dans la description d’un objet multiple en se pliant à un point de vue singulier et à des pratiques de recherche variables, tout en s’adaptant dynamiquement à l’objet. Elle a été développée sur un système d’informations extrêmement précis mais souple, que reflète l’architecture de la base (Fig. 1), ceci afin d’éviter erreurs ou redondances dans l’élaboration d’hypothèses et de favoriser la production de résultats pertinents à travers des requêtes complexes. Pour résumer le principe qui gouverne ce système, nous avons choisi de partir de l’archive en tant qu’objet identifié et conservé par une institution, pour aboutir à son élément le plus simple : le feuillet. L’analyse décompose l’objet examiné sous forme d’unités dont le niveau de cohérence est différent.
1.4.1. Quatre niveaux de description
Unité de Conservation (UniCot)
=> Unité descriptive (UniDesc)
=> Unité codicologique (UniCod)
=> Unité matérielle (UniMat)
Les chercheurs qui font usage de l’outil d’expertise de Muse décrivent d’abord l’objet en tant qu’unité de conservation (« UniCot »), comprenant l’ensemble des éléments conservés et identifiés sous une même cote, quelle que soit leur disparité, puis en tant qu’unité descriptive (« UniDesc »), constituant un ensemble particulier « découpé » dans l’unité précédente et dont la cohérence peut être matérielle mais n’est parfois qu’intellectuelle ; ensuite en tant qu’unité codicologique (« UniCod »), un sous-ensemble dont la cohérence est avant tout matérielle, mais n’empêche pas une cohérence intellectuelle, et enfin l’unité matérielle (« UniMat »), qui constitue l’élément indivisible : le feuillet. Chaque étape de cette démarche permet de couvrir la quasi-totalité des caractéristiques d’une archive – et de ses unités conservées sous une même cote – quelle qu’en soit l’hétérogénéité ou la complexité. L’autre avantage de cette structure est que chaque étape de la description ne se fait qu’une fois pour chaque unité et permet d’englober les unités dépendantes dans un même « contenant » (la description de l’unité de conservation s’applique à toutes les unités descriptives dépendantes et ainsi de suite). Si l’unité de conservation est par exemple un volume comportant d’une part des mises au net autographes, suivies de copies par un secrétaire, puis une succession de brouillons autographes, on le traitera en trois unités descriptives correspondant à ces différentes sections (en prenant appui, lorsqu’il existe, sur le catalogage détaillé fourni par l’institution de conservation). Chaque unité descriptive sera ensuite séparée en une ou plusieurs unités codicologiques selon les caractéristiques matérielles inventoriées, et à chaque unité codicologique seront liées les descriptions détaillées des feuillets qui la composent. Dans le cas de la correspondance, selon que l’institution de conservation a doté les lettres d’une cote individuelle ou qu’elles relèvent d’un ensemble – par exemple un recueil d’autographes – catalogué sous une cote unique, la saisie des différentes étapes énumérées ci-dessus peut varier. Quoi qu’il en soit, tout feuillet (ou bifeuillet) décrit au niveau « UniMat » sera nécessairement relié à une entrée « UniCot » par l’intermédiaire d’une entrée « UniCod », elle-même reliée à une entrée « UniDesc »[29].
1.4.2. L’outil de référence
Parallèlement à cette démarche concernant des opérations de description des éléments composant l’archive, se constitue au fur et à mesure une base de données de référence des types de papier identifiés (« RefPapier »), ainsi que des types de filigranes et de timbre sec (« RefFiligrane » et « RefTimbre »), des papetiers (« RefPapetiers »), des types de cachets de cire (« RefCachets »), au fur et à mesure qu’ils sont répertoriés. Lorsqu’ils décrivent une lettre ou un manuscrit, les chercheurs peuvent vérifier si un papier ou un filigrane correspondant à leur relevé existe déjà dans Muse, et dans ce cas renvoyer à la description de référence, à laquelle sera désormais associée une nouvelle occurrence. Dans le cas inverse, la description du support inédit deviendra un nouveau type de référence, lorsque les informations seront estimées suffisamment fiables.
2. La base Ribemont
À la différence de la base Muse, la base Ribemont se focalise sur un seul auteur, Condorcet (Ribemont est d’ailleurs le nom de sa ville natale). Cette base est associée au programme de recherche Inventaire Condorcet que nous présenterons dans un premier temps, avant d’évoquer ses caractéristiques matérielles.
2.1. L’Inventaire Condorcet
Le programme de recherche Inventaire Condorcet a été lancé en 2009 par une équipe du même nom[30]. Il comprend les cinq volets suivants :
1° Inventaire analytique et matériel des manuscrits ;
2° Œuvres imprimées ;
3° Inventaire analytique et matériel de la correspondance ;
4° Références secondaires ;
5° Chronologie et autres répertoires documentaires.
La plupart de ces volets sont aujourd’hui développés sur le système d’information de l’Inventaire Condorcet. Nous nous concentrons en particulier depuis plusieurs années sur le premier et le troisième d’entre eux, à savoir l’inventaire des manuscrits et de la correspondance de Condorcet, dont les données sont recueillies au sein de la base Ribemont. Le caractère « analytique » de cet inventaire est tout à fait classique : il consiste à « présente[r] sous une forme organisée, concise et précise les données […] contenues dans [chaque] document » selon la définition des Archives de France (Direction des Archives de France 2002, p. 11). L’adjectif « matériel » renvoie quant à lui à plusieurs aspects sur lesquels nous allons à présent nous attarder car ils font pour la plupart l’objet de l’interconnexion avec la base Muse.
2.2. Les données matérielles dans la base Ribemont
Bénéficiant d’une présentation et de protocoles descriptifs qui leur sont spécifiquement consacrés, les données matérielles que nous répertorions sont principalement les suivantes :
1° Les mains ;
2° Les cachets de cire ;
3° Les marques postales ;
4° Le support d’écriture.
Ces quatre principaux éléments matériels sont ventilés dans les diverses rubriques de notre base de données. S’agissant des mains, nous renvoyons par exemple à la fiche d'Étienne Cardot, copiste de Condorcet à partir de juillet 1787, fiche dans laquelle on trouve un specimen de son écriture ainsi que la liste des lettres et des manuscrits où celle-ci intervient. Relevant spécifiquement de la correspondance, les cachets de cire sont quant à eux répertoriés dans le formulaire suivant (neuf motifs ont été à ce jour distingués), avec la liste des documents qui leurs sont associés. Également liées à la correspondance, les marques postales ne bénéficient pas, à ce jour, de formulaire particulier. Il est néanmoins possible d’accéder aux données afférentes à partir du formulaire de la correspondance et de celui des lieux. S’agissant de ce dernier formulaire, on donnera pour exemple l’hôtel des postes de Paris, d’où transitait le courrier de Condorcet avec la province[31]. Le support d’écriture, enfin, est traité sous deux aspects. L’un, relativement ancien et sous forme de fichier pdf, est un Répertoire sélectif des filigranes des papiers de Condorcet. L’autre réside dans le formulaire des Papiers et filigranes où sont répertoriés les divers types de papiers utilisés par Condorcet ou ses copistes, chacun d’entre eux étant associé à la liste des manuscrits et des lettres où on les trouve.
3. L’interconnexion des bases Muse et Ribemont
À l’exception de celui relatif aux mains, les éléments matériels que nous venons de présenter font l’objet de l’interconnexion entre les bases Muse et Ribemont, que nous allons maintenant évoquer. La nécessité de l’interconnexion résulte évidemment de l’indépendance initiale des deux bases, mais une fois cette interconnexion réalisée, cette indépendance se révèle être un atout, compte tenu de l’envergure de la base Muse qui, par son caractère multicorpus, permet d’éventuels recoupements entre les types de papiers utilisés par Condorcet ou ses copistes et ceux utilisés par ses contemporains.
Les bases Muse et Ribemont sont mises en relation via deux tables spécifiques dites d'échange définissant les informations qui leur sont communes. Une opération automatique effectue une copie partielle des informations issues de Muse pour les publier dans la base Ribemont[32]. De façon réciproque, une partie des informations concernant les lettres et manuscrits de Condorcet, provenant de Ribemont, est recopiée dans la base Muse et l'alimente ainsi. Ces deux processus de transfert, dont nous donnons le détail ci-après, sont intégrés à l'application (webActors) qui produit le site de l'Inventaire Condorcet.
3.1. De Muse vers Ribemont
Les données matérielles saisies dans Muse à partir de l’examen codicologique des archives de Condorcet sont transférées vers le site de l’Inventaire Condorcet et accessibles à travers la base Ribemont pour chaque lettre et chaque manuscrit qui y sont analysés.
Quoique directement extraites de muse, ces données sont au préalable formatées et réorganisées dans l’application pour s’adapter à l’ergonomie du site de l’Inventaire Condorcet, mais aussi en permettre une lecture plus aisée. Toutefois, on y retrouve l’essentiel des informations présentes dans Muse en ce qui concerne la description de l’occurrence et la description de référence du type de papier, lorsque celui-ci a été identifié. Cette description de référence fournit les caractéristiques principales du type de papier, en une vingtaine de critères[33], parmi lesquels figurent évidemment les informations concernant le filigrane. Une ou plusieurs images « de référence » du filigrane sont donc associées à ce type de papier. Par conséquent, les images présentées dans la base Ribemont ne proviennent pas nécessairement du document examiné lui-même, mais d’un document choisi pour illustrer au mieux le type dans la table « RefFiligrane » de Muse, parce que le filigrane y est complet et la reproduction numérique de qualité.
Ces données matérielles sont accessibles sur le site de l’Inventaire Condorcet à plusieurs niveaux de la base Ribemont : par le biais du formulaire Papiers et filigranes, qui présente une liste des types de papier utilisés par Condorcet, ses copistes ou certains ses contemporains[34], en répertoriant les occurrences qui y sont rattachées ; par le biais de la section Papiers et cachets de la notice décrivant la correspondance, par celle de la section Papiers de la notice décrivant les manuscrits. Un ouvrage en cours d’élaboration procurera un Répertoire des papiers filigranés de Condorcet sous un format imprimé[35], version pérenne et aisément consultable en cas de difficultés d’accès au réseau, tandis que les deux bases continueront d’offrir des mises à jour, en prise directe avec l’avancée des recherches.
Voici tout d’abord les données qui font l’objet du transfert de Muse vers Ribemont, en excluant les champs « Remarques ».
–Numéro du feuillet ou bifeuillet décrit
–Identifiant du feuillet ou bifeuillet dans Muse
–Pliage d’utilisation (feuillet/bifeuillet)
–Format de pliage (in-folio/ in-4°/in-8°/autre)
–Hauteur du feuillet
–Largeur du feuillet
–Identifiant du type de papier
–Descriptif du type de papier[36]
–Images du filigrane
Concrètement, chaque occurrence sera détaillée comme suit dans Ribemont : « IDC 2583 : Lettre de Condorcet à Bernoulli, Johann II - 1er juin 1782. Basel, Universitätsbibliothek, Bernoulli Archiv, Mappe II, Nr 8, ff. 15-16. Type de papier BNF582. Bifeuillet in-4°. Dimensions : 196 x 154 mm ». Les cinq premiers éléments de cet énoncé proviennent de Ribemont, les trois derniers de Muse. De plus, toute occurrence ayant pour support le type BNF582 présentera dans la section Papier de sa notice les informations suivantes : « Vergé écru, assez lisse. Épaisseur moyenne : 0,128 mm. Dimensions feuille entière : 310 x 390 mm (rogné). Filigrane : Marque : Cornet sur écu fleurdelisé / chiffre 4 à double chevrons. Contremarque : “ Van der Ley”. Écart entre lignes de chaînette : 24 mm mini -24 mm maxi. Transfil côté marque : 12 mm ». Enfin l’onglet Papiers et Filigranes de Ribemont permettra de visualiser les images du filigrane concerné, et renverra, pour chaque type de papier, à la liste des occurrences répertoriées sur ce support – en fonction des identifications établies sur Muse.
3.2. De Ribemont vers Muse
La relation entre les deux bases n’est pas à sens unique, puisque l’importation des données concernant l’identification des textes, la datation, etc. en provenance de Ribemont permet à Muse de s’enrichir d’informations essentielles pour l’identification exacte des unités décrites : par le biais de mise à jour quotidiennes, Muse bénéficie ainsi des dernières améliorations ou corrections apportées au traitement des manuscrits et du corpus de la correspondance de Condorcet par l’équipe de l’Inventaire.
On trouvera ci-dessous la liste des métadonnées dont le contenu est régulièrement transféré de Ribemont vers Muse (en exceptant les champs « Note(s) »). Nous distinguons, par les couleurs bleues et vertes, les métadonnées relevant respectivement des manuscrits et de la correspondance.
–Identifiant du document
–Titre indiqué par le scripteur
–Titre rétabli ou normalisé
–Datation
–Lieu d’écriture
–Lieu d’écriture indexé
–Espace graphique
–Surface écrite
–Incipit
–Titre de lettre
–Date de réception
–Marque du bureau d’expédition
–Bureau d’expédition indexé
–Autres marques postales
–Pli cacheté/non cacheté
–Cachet Oui/ Non/ Traces
–Identifiant du cachet
–Motif du cachet
–Couleur du cachet
–Image de référence du cachet
L’importance des métadonnées relatives à la correspondance s’explique par le fait qu’elle recèle dans la base Ribemont deux catégories matérielles qui lui sont spécifiques, à savoir les marques postales et les cachets de cire. Notons que la base Muse comporte une table réservée aux données spécifiques de la correspondance, de façon par exemple à distinguer le pliage d’utilisation (feuillet ou bifeuillet), rubrique qui s’applique également aux manuscrits, et le pliage d’expédition, propre aux lettres. Selon l’organisation des rubriques dans Muse, les métadonnées importées de Ribemont sont dirigées à différents niveaux, soit vers « UniCod », soit vers « UniMat », voire vers « RefCachet » pour l’identification et l’iconographie des cachets de cire employés par Condorcet. Le projet de l’Inventaire Condorcet consacré à la correspondance, soutenu par l’ANR entre 2017 et 2020, a permis d’enrichir dans Muse les métadonnées propres aux caractéristiques épistolaires, et d’élaborer un modèle d’échanges de données entre les deux bases qui pourra à l’avenir bénéficier à d’autres corpus d’auteurs dont l’étude matérielle serait également menée dans Muse.
En tant qu’outil de travail, la nature même de la base Muse est d’être réservée aux spécialistes de codicologie moderne et contemporaine, ainsi qu’à ceux des corpus traités. Une fois concaténées, les données qu’elle produit sont en revanche libres d’accès, comme c’est le cas pour celles figurant actuellement dans la base Ribemont. Muse offre en effet une large compatibilité en utilisant les solutions offertes par XML et MySQL, et permet également de respecter les standards imposés par l’écosystème des SHS et de proposer des métadonnées normalisées afin d'être interopérables vers ISIDORE, Gallica/BnF, Europeana, etc., mais aussi d’assurer sa compatibilité avec des sites d’études de corpus textuels, de données matérielles ou d’archives historiques tels que Ribemont, qui utilise les mêmes solutions.
Conclusion
Alors que la numérisation de l’objet écrit tend à réduire ce dernier à une séquence d’images bidimensionnelles, opération de transfert qui implique la perte de nombreuses informations non perceptibles en surface, qu’il s’agisse des caractéristiques internes ou tactiles des supports (filigrane, trame vergée, épair, etc.) ou de son agencement en trois dimensions (association de bifeuillets en liasses ou en cahiers, pliages, collages, etc.), la base Muse propose de compenser de telles lacunes, en apportant aux corpus manuscrits numérisés des données complètes sur l’organisation et l’identification du support papier qui les compose, de façon à restituer leur dimension matérielle « gommée » par la reproduction numérique des pages écrites. En effet, contrairement aux arguments en vogue, nous gageons que le processus de « dématérialisation » de l’archive papier via les supports de diffusion numériques implique un effort concomitant de « re-matérialisation » par l’intermédiaire des études codicologiques, du moins si l’on tient à préserver l’intégrité historique de la culture écrite. Les notices offertes par Ribemont en sont une parfaite illustration, permettant de prendre en considération l’archive dans toute sa dimension intellectuelle (historique, scientifique, biographique, etc.) et matérielle. Grâce à son interconnexion avec la base Muse, cet inventaire est en effet le premier à fournir une description matérielle précise visant à restituer l’objet manuscrit dans son intégralité, et non uniquement ses contenus textuels. La base Ribemont, qui permet de consulter dans un même inventaire numérique des archives dispersées aux quatre coins du monde, offre ainsi pour la première fois un véritable substitut en ligne aux documents conservés en institution.
[1] Voir par exemple Reassembling the Republic of Letters in Digital Age, Standards, Systems, Scholarship, H. Hotson and T. Wallnig (dir.), Göttingen University Press, 2019, et Miranda Lewis, “Connecting correspondences and the evolution of a union catalogue: Early Modern Letters Online”, in Inventorier les correspondances des Lumières. Analyse matérielle et traitements numériques, C. Bustarret, E. de Champs et N. Rieucau (dir.), Centre international d’étude du XVIIIe siècle, Ferney-Voltaire, 2023, p. 201-211.
[2] Voir Claire Bustarret et Éric Vanzieleghem, « Inventaire Condorcet : méthodes érudites et gestion électronique », Bulletin du bibliophile, 2016/2, p. 330-355 ainsi que C. Bustarret, « Présentation », Inventorier les correspondances des Lumières, ouvrage cité, 2023, p. 11-21.
[3] https://www.inventaire-condorcet.org
[4] Voir le Vocabulaire codicologique de Denis Muzerelle (CEMI, 1985), dans l’application Codicologia. En ligne : http://codicologia.irht.cnrs.fr/accueil/vocabulaire ; Denis Muzerelle, Ezio Ornato et Monique Zerdoun, « Un protocole de description des papiers filigranés », Gazette du livre médiéval, 1989/14, p. 16-24. En ligne : https://www.persee.fr/doc/galim_0753-5015_1989_num_14_1_1091. Monique Zerdoun, Les Papiers filigranés médiévaux. Essai de méthodologie descriptive, Bibliologia 7 et 8, Brepols, Turnhout, 1989.
[5] Au sein du CAM, puis de l’ITEM. Voir Louis Hay, « Éléments pour l’étude des manuscrits modernes », Codicologica 1976/1, p. 91-108, et Marianne Bockelkamp, « L’analyse bétaradiographique du papier appliquée aux manuscrits de Diderot », Studies on Voltaire and the Eighteenth Century, 254, Oxford, Voltaire Foundation, 1988, p.139-173.
[6] Raymond Gaudriault, Filigranes et autres caractéristiques des papiers fabriqués en France aux XVIIe et XVIIIe siècles, CNRS Ed., J. Telford, 1995. En ligne : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3371715d.texteImage
[7] Claire Bustarret, « L’histoire du papier appliquée à l’étude des manuscrits modernes : la base de données Profil », Actes du Colloque d’Annonay (1994), IPH Congress Book, vol. 10, 1994, p. 39-43 ; C. Bustarret et Brigitte de La Passardière, « Profil, an iconographic database for modern watermarked papers », Computer and the Humanities, 36, 2, 2002, p. 143-169.
[8] Claire Bustarret et Serge Linkès, « Un nouvel instrument de travail pour l’analyse des manuscrits : la base de données Muse », Genesis, revue internationale de critique génétique, n° 21, 2003, p. 161-177. https://www.persee.fr/doc/item_1167-5101_2003_num_21_1_1267, ainsi que C. Bustarret et S. Linkès, « De Muse en Argolide, ou la codicologie à l’ère du numérique », De l’hypertexte au manuscrit. Recherches et travaux, 72/2008, Grenoble, ELLUG, p. 119-136. En ligne : https://doi.org/10.4000/recherchestravaux.97.
[9] Rebekah Ahrendt, Nadine Akkerman, Jana Ambrogio, Daniel Starza Smith, and David Van der Linden, “Letter as Object”, Reassembling the Republic of letters, ouvrage cité, 2019, Chap. II.1-3, p. 65 [notre traduction].
[10] Claire Bustarret et Mathieu Duboc : « La base de données Muse et l’étude des filigranes en codicologie moderne et contemporaine », Claude Laroque, Valérie Lee, Maryse Pierrard (dir.), Actes des journées d’étude Les filigranes, une marque à explorer, Paris, site de l’HICSA, p. 85-107, mis en ligne octobre 2020 http://hicsa.univ-paris1.fr/documents/pdf/PublicationsLigne/Actes%20Laroque%202020/05_BUSTARRET-DUBOC.pdf et Serge Linkès, « Muse, outil de référence en codicologie moderne et contemporaine », in Inventorier les correspondances des Lumières, op. cit., p. 69-79.
[11] Voir https://www.huma-num.fr.
[12] Voir Georg Dientz, “New Database of Watermarks and Paper for Art-historians” , IPH Congress Book, vol. 15, 2006, p. 189-190, et par exemple : A digital Catalogue of Watermarks and Type Ornaments used by William Stansby in the Printing of The Workes of Beniamin Jonson (London: 1616) En ligne : http://www2.iath.virginia.edu/gants/Folio.html.
[13] Voir la plupart des bases partenaires du projet « Bernstein-Memory of Paper » http://www.memoryofpaper.eu.
[14] Le protocole suivi comporte les entrées principales recommandées par International Standard for the Registration of papers with or without Watermarks, IPH, 2013 (version 2.1.1) [En ligne : http://www.paperhistory.org/Standards/IPHN2.1.1_en.pdf ], ainsi que de nombreuses entrées supplémentaires requises pour décrire des supports complexes tels qu’un cahier d’écolier de fabrication industrielle.
[15] Claire Bustarret et Anne-Marie Basset, « Les Cahiers d’Impressions d’Afrique : l’apport de la codicologie à l’étude génétique », Genesis, revue internationale de critique génétique, 1994/5, p. 153-166 et Claire Bustarret, « Les cahiers de La Recherche, un labyrinthe de papier ? », Proust aux brouillons, Turnhout, Brepols, 2011, p. 17- 28.
[16] Claire Bustarret, « Interroger "l'existence matérielle de l'œuvre" : une enquête sur les papiers de Balzac », L’Année balzacienne, 1999 (II), p. 503-527, ainsi que « Enquête sur les papiers dans les dossiers préparatoires : Zola ou le degré zéro du support ? », Zola : genèse de l’œuvre, J.-P. Leduc-Adine dir., CNRS Éditions, 2002, p. 263-279.
[17] Catherine Volpilhac-Auger, avec la collaboration de C. Bustarret, L’Atelier de Montesquieu, Manuscrits inédits de La Brède, Cahiers Montesquieu 7, Liguori Editore, Napoli, Voltaire Foundation, Oxford, 2001.
[18] Serge Linkès, « Le manuscrit de Lamiel : la fin d’une énigme ? » in Le dernier Stendhal 1837-1842, Eurédit, Paris, 2000. En ligne : hal-03762613, ainsi que « Éditer le manuscrit inachevé. Vraies et fausses vertus du numérique », in De l’hypertexte au manuscrit. Recherches & travaux, 72/2008, p. 185-199. En ligne : https://doi.org/10.4000/recherchestravaux.106
[19] Pour plus de détails, voir Claire Bustarret, « L’analyse matérielle des correspondances des Lumières – pourquoi recourir à la codicologie ? », in Inventorier les correspondances des Lumières, ouvrage cité, p. 39-56.
[20] Durée estimée pour une production d’environ 800 rames par paire de formes, cf. Gaudriault, op. cit., p. 14. Sur l’étude des formes, voir Formes et formaires. Protocole descriptif pour les formes papetières (XVIIIe-XXe s.) & Répertoire des formaires en France (XVIe-XIXe s.), CahierS de l’AFHEPP n°3, C. Bustarret (dir.), AFHEPP, 2021. Pour la période industrielle, la production en série rend inapplicable une telle précision, et il faudra se contenter de distinguer parmi les produits commercialisés ceux dont les caractéristiques observables semblent suffisamment distinctes.
[21] Voir Jean Irigoin, « La datation par les filigranes du papier », Codicologica, 5, 1980, p. 9-36 et Russell Jones, « From papermill to scribe : the lapse of time », Papers from the IIIrd European Colloquium on Malay and Indonesian Studies, Istituto Universitario Orientale, Napoli, 1988, p. 153-169. Gaudriault, op. cit., p. 28 cite des délais plus longs, pour des périodes antérieures au XVIIIe siècle.
[22] Catherine Volpilhac-Auger, ouvrage cité, 2001, voir également Claire Bustarret, « Descriptifs des manuscrits » et « Tableau des mains et des papiers » in Œuvres complètes de Montesquieu, t. 3-4, De l’esprit des loix, dir. P. Rétat et C. Volpilhac-Auger, Oxford, Voltaire Foundation, IISF, Napoli, 2008, p.clxxvii-ccxxxvi et ccxlvi-ccli.
[23] Condorcet, Tableau historique des progrès de l’esprit humain. Projets, Esquisse, Fragments et Notes (1772-1794), J.-P. Schandeler et P. Crépel (dir.), Groupe Condorcet, Paris, Institut National d’Études Démographiques, 2004.
[24] La Correspondance de Condorcet. Documents inédits, nouveaux éclairages. Engagements politiques, 1775-1792, N. Rieucau (dir., avec A. Chassagne et C. Gilain), Ferney-Voltaire, Centre international d’étude du XVIIIe siècle, 2014 et La Correspondance de Condorcet : Documents inédits, nouveaux éclairages. Les relations de Condorcet avec les Provinces françaises, 1772-1791, N. Rieucau (dir., avec F. Launay et J.-D. Candaux), Ferney-Voltaire, Centre international d’étude du XVIIIe siècle, 2019.
[25] André Magnan, « La navette Condorcet-Ruault, archive centrale du "Voltaire" de Kehl : outils, pilotis, datations, documents pour l’histoire littéraire », dans La Correspondance de Condorcet, 2014, ouvrage cité, p. 202.
[26] Voir Nicolas Rieucau, « Comment dater un manuscrit sans le comprendre ? Le cas des archives Condorcet », Dix-huitième siècle, 2013, 45, p. 681-718.
[27] Claire Bustarret et Serge Linkès, « De Muse en Argolide, ou la codicologie à l'ère du numérique », Recherches & Travaux [En ligne], 72 | 2008, p. 119-136, mis en ligne le 15 décembre 2009. https://doi.org/10.4000/recherchestravaux.97
[28] Serge Linkès, « Du manuscrit moderne au brouillon numérique : un nouveau défi pour la critique génétique ? », in Génétique des textes et des formes : l’œuvre comme processus, Actes du Congrès international de Cerisy-la-Salle, CNRS-Éditions, Paris, 2017.
[29] Mathieu Duboc, « Protocoles de description du papier appliqués à l'inventaire de la correspondance et des manuscrits de Condorcet », in Inventorier les correspondances des Lumières, ouvrage cité, p. 57-67.
[30] Pour plus de détails, voir Gérald Foliot, Nicolas Rieucau et Éric Vanzieleghem, « Le traitement numérique de la correspondance de Condorcet », in Inventorier les correspondances des Lumières, ouvrage cité, p. 119-131.
[31] Pour plus de détails, voir Éric Vanzieleghem, « Les marques postales comme source dans la correspondance française de Condorcet », in Inventorier les correspondances des Lumières, ouvrage cité, p. 81-90.
[32] Voir l’onglet « Papiers et filigranes » : https://www.inventaire-condorcet.com/Inventaire/Papiers_et_filigranes, comptant à ce jour 290 types de papier.
[33] Parfois réunis sous la forme d’une concaténation.
[34] Si les lettres adressées à Condorcet ne font pas l’objet d’une expertise matérielle approfondie, l’examen détaillé de manuscrits rédigés par ses proches ou ses collaborateurs peut dans certains cas fournir des renseignements précieux sur des matériaux d’écriture qu’ils ont partagés, notamment en vue d’identifier un type de papier dont l’occurrence serait incomplète sous la plume de Condorcet, tandis qu’on trouve la feuille complète sous celle par exemple de Fouchy, comme c’est le cas pour certains plumitifs de l’Académie des sciences.
[35] Claire Bustarret et Mathieu Duboc, Répertoire des papiers filigranés de Condorcet, CahierS de l’AFHEPP n°4, AFHEPP, Montreuil, 2023.
[36] Ce descriptif résulte d’une concaténation de 14 champs provenant de Muse – Technique de fabrication, Couleur, État de surface, Épaisseur moyenne, Hauteur et Largeur de la feuille entière, Pondération des dimensions, Marque, Contremarque, Signe supplémentaire, Écart (minimum et maximum) entre les lignes de chaînette, Transfil (côté marque et côté contremarque) –, si bien que l’exportation vers Ribemont concerne en fait au total 22 champs.